Annecy 2016 – Du côté des courts

Du coté des courts-métrages en compétition, rien de tel que de visionner l’ensemble de la sélection de l’année pour toucher du doigt le reflet de notre société et ressentir l’état du monde à travers la vision des artistes de l’animation.

Nulle surprise donc de constater que nombre d’entre eux étaient sombres et teintés d’un certain fatalisme. Le court-métrage est également le format idéal (et budgétairement « accessible ») pour permettre aux réalisateurs de se faire remarquer et espérer diriger un jour, un projet de long-métrage.
Au-delà d’une sélection extrêmement variée en termes de styles, de techniques ou de contenu (exit la 3D plastiquement sans défaut), quelques pépites sont toutefois sorties du lot et ont été plébiscités par le public comme par les membres du jury…

Si l’histoire est importante voire primordiale dans un court, c’est la façon dont le réalisateur plonge le spectateur dans un univers, qui fait la différence. A ce titre, Périphéria a mis tout le monde d’accord. Ce court-métrage de David Coquard-Dassault et produit par Autour de Minuit, entraine le spectateur dans l’ambiance urbaine pesante, sauvage et presque « post apocalyptique » d’une vaste cité de banlieue désertée par les humains et dans laquelle rodent une meute de chiens errants. Une certaine tension est palpable et le spectateur est happé dans les méandres des immeubles abandonnés. La fin inattendue est une jolie surprise !

© Autour de Minuit
© Autour de Minuit

J’ai perdu la tête
Mais le court qui a fait l’unanimité était sans aucun doute : Une tête disparaît du réalisateur français Franck Dion qui a remporté le Cristal du court-métrage (l’ultime récompense à Annecy). Découvert en 2004 avec l’Inventaire fantôme (produit par Didier Brunner) ce premier film avait déjà été primé (prix du Jury Junior Canal J ) www.franckdion.net.
Depuis, le réalisateur n’a cessé de surprendre par son talent (et sa belle personnalité), tout comme son envie toujours aussi vive de créer de nouveaux courts-métrages, quels que soient la technique ou l’univers exploré. Cette fois, avec Une tête disparaît, Franck Dion évoque la triste réalité de la maladie dégénérative de Jacqueline, son héroïne, une vieille dame qui perd la tête, au sens propre comme au figuré. Empreint d’une véritable poésie, où l’humour est finement distillé par touches, ce film ne peut laisser quiconque indifférent tant il est réussi ! Le style graphique ouaté renforce l’atmosphère onirique dans laquelle Jacqueline vit sa réalité. Les dialogues au vocabulaire précis et la réalisation sans faille (la musique a guidé le réalisateur dans son montage), ajoutent à ce film tous les ingrédients du succès. Une tête disparait est un bel hommage du réalisateur à sa grand-mère.

© Papy3d - Office National du Film du Canada – Arte France
© Papy3d – Office National du Film du Canada – Arte France

Enfin, l’autre grand moment tricolore de ce festival fut lorsque le public d’Annecy a découvert parmi les longs-métrages en compétition cette année, du réalisateur Claude Barras (Rita productions, Blue Spirit, Gebeka films, KNM). Adapté du roman de Gilles Paris : Autobiographie d’une courgette, ce film a été ovationné dès sa projection à Cannes. Il a reçu un accueil très enthousiaste à Annecy, ce qui lui a valu de remporter le Prix du public et le Cristal du long-métrage. En effet, non seulement l’histoire de Courgette, un petit garçon de 10 ans qui n’a pas eu beaucoup de chance dans la vie est poignante poétique et tendre à la fois, mais les dialogues entre les enfants du foyer dans lequel Courgette va vivre une nouvelle vie sont d’une justesse réellement touchante. « J’ai souhaité transmettre l’univers poétique de l’auteur du roman notamment à travers le regard des personnages. Leurs immenses yeux, grands ouverts sur le monde, font la part belle à l’émotion et à l’empathie », déclare le réalisateur.
Enfin, techniquement, Ma vie de Courgette a été entièrement réalisé en stop-motion ; du jamais-vu pour un long-métrage français depuis le Roman de Renard de Ladislas Starewitch, le premier long-métrage de marionnettes de l’histoire du 7e art qui date quand même de 1930 ! Ma vie de Courgette ravira petits et grands à n’en pas douter dès sa sortie en salle le 19 octobre 2016.

Teaser Ma Vie de Courgette : http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19563111&cfilm=236415.html

© Rita productions, Blue Spirit, Gebeka films, KMN
© Rita productions, Blue Spirit, Gebeka films, KMN